MORCEAUX CHOISIS

Bleu

Le 13/11/2022

                                 I.

 

Lorsque j’étais enfant, pur et blanc comme un ange,

Je faisais fort souvent ce rêve bien étrange

Que, sylphide et léger, je volais dans les airs,

Abandonnant au sol turpitude et misère.

 

Dans l’instant d’une nuit, quel doux ravissement,

Quel plaisir de pouvoir dompter le firmament,

D’être au dessus des lois physiques et charnelles,

Comme un geai, un bourdon ou une coccinelle.

 

Le temps fort et critique est bien de décoller ;

Je ne sais, jusque là, si je pourrai voler.

En fixant droit devant, je me concentre. Enfin,

Je m’apprête à partir pour les contrées sans fin.

 

Et voilà, j’ai bondi. Bras et jambes s’efforcent

D’aller chercher le ciel. L’ascension s’amorce.

Intense est cet effort. Si mes membres succombent,

C’est mon corps tout entier qui s’affaisse et qui tombe.

 

Je touche enfin ce ciel que je voulais rejoindre.

Je me sens très léger et mes efforts sont moindres.

Je nage dans les cieux comme on plane dans l’eau

Et je cherche à monter plus haut, toujours plus haut.

 

Insolite plaisir, intense et radical,

Les choses d’ici bas me plaisent verticales !

C’est ma chère maison que je voyais, du reste,

A ces instants sacrés des épopées célestes.

 

Toisant la profondeur, je prends de l’altitude,

En quête d’infini, de bleu, de plénitude.

Là, le silence est roi et seul le bleu m’entoure ;

Je suis au paradis dans ce vaste velours.

 

Toujours plus je m’élève, impavide grimpeur,

Vers l’auguste néant qui m’aspire. J’ai peur

De lui, soudainement, de ce troublant mystère,

J’ai peur de ne jamais redescendre sur terre.

 

Je plonge vivement, saoulé par la vitesse,

Esclave de mes sens enivrés de caresses.

De loopings en piqués, dans ce géant ravin,

Je rejoins, peu à peu, le plancher des bovins.

 

Mais mon sommeil s’écourte, à cet instant précis,

Interrompant mon songe et mon plaisir, aussi.

Je m’étais endormi dans les bras de la Terre ;

Je me réveille là, dans les jupons de l’Air.

 

Hélas, je ne suis plus pur et blanc comme un ange,

Je ne fais jamais plus ce rêve bien étrange.

Mais nuits sont désormais bien mornes, bien austères.

Suis-je devenu lourd ? Serais-je terre à terre ?

                                     II.
 

Il est là, monstrueux, de béton, de mortier,

Ce pompeux carrefour du monde tout entier.

Moderniste, hideux, il est beau, il est fort ;

C’est un vaste perchoir ; c’est un aéroport.

 

Sur la piste d’asphalte, un oiseau de métal

Patiente, serein, comme un aigle royal.

L’aéronef, figé sur le sol, immobile,

Attend pour s’envoler comme un aigle docile.

 

Hautain, impérial, il avance tout droit,

Tout puissant souverain aux allures de roi.

Imperceptiblement, la cadence accélère ;

Il suffoque ici bas ; l’oiseau doit manquer d’air.

 

Vivement élancé, au zénith de sa force,

Il dresse alors son nez ainsi qu’on bombe un torse,

Regardant, dédaigneux, l’orbe démentiel,

Avant de s’envoler aux confins du bleu ciel.

 

Dans un strident fracas, les quatre réacteurs

Hurlent en vomissant les flammes des moteurs,

Sur l’ignoble goudron, dans l’air mort et vicié.

Un éclair a relui sur les ailes d’acier.

 

Il domine et conquiert la déserte mollesse.

Ne cessant de monter, il se cambre ,il se dresse,

Laissant derrière lui un singulier sillage.

Le voilà maintenant qui crève les nuages.

 

D’un coup d’ailes facile, il a touché les cieux.

Là, l’oiseau évolue, svelte et silencieux.

A travers un hublot, le bleu, dans son empire,

S’étend à l’infini, ce bleu auquel j’aspire.

 
                                      III.
 

Toi qui as ces joyaux, ô femme aux bleus spinelles,

Tu es ma préférée ! Je vois dans tes prunelles

Ce hublot transparent qui laissait apparaître

Le bleu dans son empire, ô, divines fenêtres !

 

Tes yeux clairs azurés m’obsèdent, me fascinent,

Ton regard infini où le ciel se dessine

M’attire vers son fond turquoise, magnétique,

Mais j’ai, de ce regard, une peur psychotique.

 

Dans tes yeux, c’est le bleu de ce songe bizarre

Que je voyais jadis, incroyable hasard,

Limpide, immaculé, sublime ! C’est le même

Qui m’attirait vers lui : voilà pourquoi je t’aime.

 

Tes yeux sont une fente où le jour vient à naître

Ouverte sur l’Eden qu’il me semble connaître.

Ils sont un coin de ciel, de cristal et de rêve,

Impossibles d’accès même si on les crève.

 

Toi qui as deux écrins où le saphir reluit,

Tu es un séraphin qui emporte avec lui

Deux fragments de ciel bleu sculptés, deux rondes billes,

Ornées d’un noir poinçon en guise de pupille.

 

Perdues, la pureté et la blancheur de l’ange !

Je ne volerai plus dans les célestes franges,

Mais je prends dans tes yeux la couleur qui m’inspire,

Perdu à tout jamais, ce bleu auquel j’aspire.

 

Rémy

Vaisseaux fantômes

Le 13/11/2022

Dans le flux de nos veines,

Un intrus l’on devine,

La pointe d’une épine,

Le courant de nos peines.

 

Une souffrance naine,

Ainsi qu’une canine,

Darde puis se dessine,

Hideuse et presqu’obscène.

 

Sourde, elle morigène ;

Déjà, je l’imagine

Qui s’affaire et s’affine

Nichée dans la saphène,

 

Déployant ses antennes.

Elle court et s’obstine,

Se fait la concubine

Des veinules ébène,

 

Méchante châtelaine,

Sournoise et pateline

Qui, dans cette courtine,

Nous emprisonne, hautaine.

 

Puisque l’on nous enchaîne,

On pleurniche, on crachine

De grosses avelines,

Comme des madeleines.

 

Dans le sang, inhumaine,

Elle va et chemine,

Casanière et chauvine,

Ainsi que le chevaine,

 

Et, loin d’être une aubaine

Pour notre hémoglobine,

Sa morsure androgyne

Est bientôt pathogène.

 

Là, sous la porcelaine

Falote, hâve, opaline,

Elle siffle en sourdine

Une élégie soudaine.

 

Résonne la sirène

Aux échos qui serinent

L’éternelle routine

Dont l’issue est certaine.

 

Nervures méthylène,

La douleur est maline,

Cinglante et nous lamine,

Amère, peu amène.

 

Un mal rongeant se traîne

Au fond de la poitrine,

Orage qui ravine

Le ténébreux aven.

 

Vole au vent, la phalène,

Comme la popeline !

Dans les airs se confinent

Des chatons et des faînes.

 

Un singulier pollen

Jaillit et dégouline ;

Les pensées libertines

Courent la prétentaine.

 

Encor bien moins sereine

Dans un conduit marine,

Les chimères chagrines

Empestent la gangrène,

 

Condamnées, dans l’arène,

A l’agonie taurine :

Passion, assassine

Tes amants sur la scène !

 

Sangsues de la rengaine,

Sanglots des voies sanguines,

De nos larmes salines

S’exhale votre haleine.

 

Et des pleurs, par dizaines,

Ruissèlent et voisinent,

Tels des grains de résine

Sur un mat de misaine.

 

Lierres, guis et lichens,

Lianes tant mesquines,

Ronces et églantines

Qui croissez par centaines

 

Aux abords du vieux chêne,

Assaillant son échine,

Le vent le déracine

Par votre aide malsaine !

 

Ô, pauvre énergumène,

L’âpre poison te mine !

Gonflées par tant de spleen,

Tes veines sont trop pleines.

 

Bible lacrymogène,

Notre vie se pagine,

Et, à pas de feutrine,

Se suivent les étrennes.

 

Vieux fossile éocène,

Oui, tes jours se calcinent !

Tristement, une Ondine,

Dans un paisible Eden,

 

Chante une cantilène,

Pinçant sa mandoline ;

Ses larmes sont divines

Mais les tiennes sont vaines.

 

Rémy

Lolie

Le 13/11/2022

Que j’aime à contempler vos tactés élancés,

Chère Etoile, divine en tutu d’Organdi,

Vos manèges soignés, vos entrechats racés

Sont un enchantement extrême, ô Milady!

 

Quelle légèreté, quelle grâce sublime

Plaisamment vous offrez lorsque au-dessus des planches,

Comme l’elfe fluet d’un coquet pantomime,

En tournoiements exquis votre corps se déhanche!

 

Je suis émerveillé, Lolie, par vos prouesses!

Vous voir virevolter est un ravissement,

Sur mes yeux médusés une pluie de caresses,

L’onctueuse ambroisie que l’on boit doucement.

 

Aussi viens-je exprimer toute la gratitude

Pour l’aimable attention qui me fut accordée

Par vos soins prévenants, pour la béatitude

Qui me berce en venant, conquis, vous regarder.

Artificial Intelligence ai has the potential to revolutionize

Rémy